Assurance décennale et sous-traitant : attention police !
Assurance décennale et sous-traitant : un récent arrêt de la Cour de Cassation nous amène à rappeler brièvement les règles en matière de sous-traitance et de garantie décennale (3ème Civ, 23 mai 2019, n° 18-13837).
Un couple avait confié des travaux de réfection et d’isolation de la toiture de leur maison à Leroy Merlin, qui en avait sous-traité la réalisation à un artisan assuré auprès de la MAAF. Suite à l’apparition de désordres, et après expertise, les maîtres d’ouvrage ont assigné en indemnisation Leroy Merlin, qui a appelé en garantie son sous-traitant et l’assureur de ce dernier.
Devant la Cour d’Appel, les demandes de Leroy Merlin à l’encontre de la MAAF ont été rejetées, dans la mesure où les juges ont estimé que le libellé de l’attestation d’assurance versée était insuffisant, si bien qu’il n’était pas démontré que ladite assurance couvrait la responsabilité contractuelle de droit commun du sous-traitant.
Cette décision est cassée par la Cour de Cassation.
La Haute Juridiction a relevé que l’attestation d’assurance stipulait que la responsabilité civile de l’artisan était couverte dans le cas où elle serait recherchée en qualité de sous-traitant vis-à-vis du locateur d’ouvrage, dans les conditions et limites posées par les articles 1792 et suivants du Code Civil.
La Cour de Cassation en a déduit que la responsabilité de l’artisan en sa qualité de sous-traitant de la société Leroy Merlin, qui était de nature contractuelle, était bien garantie par la MAAF.
Cet arrêt est l’occasion d’aborder le régime en matière d’assurance décennale et sous-traitant.
La responsabilité décennale, et l’obligation d’assurance qui en découle, concerne les constructeurs qui sont directement liés au maître d’ouvrage par un contrat de louage d’ouvrage.
Les sous-traitants n’ont pas de lien direct avec le maître d’ouvrage. Ils n’engagent donc pas leur responsabilité décennale envers ce dernier, et ne sont donc pas obligés de souscrire une garantie décennale.
Les sous-traitants sont-ils affranchis de toute responsabilité pour autant ? Bien évidemment non. Si une entreprise principale et son sous-traitant ne sont pas soumis à la même obligation d’assurance, ils encourent toutefois les mêmes risques !
D’une part, vis-à-vis de son donneur d’ordre, le sous-traitant engage sa responsabilité contractuelle et est tenu d’une obligation de résultat (3ème Civ, 22 juin 2010, n° 09-16199).
D’autre part, vis-à-vis du maître d’ouvrage, le sous-traitant engage sa responsabilité délictuelle, et la victime doit apporter la preuve d’une faute du sous-traitant (Ass Plén, 12 juillet 1991, n° 90-13602).
Mais si le maître d’ouvrage parvient à établir une telle faute (et la majorité des expertises judiciaires sont capables de souligner les malfaçons commises par l’entreprise), alors le sous-traitant peut être déclaré responsable, alors qu’il n’est pas obligatoirement assuré pour ce risque !
Cela signifie que le constructeur est tenu sur ces deniers propres, et si c’est un artisan, sur ces deniers personnels.
Assurance décennale et sous-traitant : il importe donc de faire très attention à la police souscrite. Bien qu’étant une garantie facultative, il est fortement recommandé de souscrire une assurance couvrant la responsabilité civile de l’assuré dans le cas où elle serait recherchée en qualité de sous-traitant vis-à-vis du locateur d’ouvrage, pour les dommages de nature décennale.
Pour le donneur d’ordre, il est également préférable de vérifier que le sous-traitant a bien souscrit une telle garantie décennale facultative.