PROTECTION DES OUVRAGES EN COURS DE CHANTIER
Bonjour à tous,
Je suis ravie de vous retrouver pour une nouvelle vidéo.
Aujourd’hui nous allons voir ensemble quelles sont les obligations des entreprises quant à la protection de leurs ouvrages en cours de chantier.
Un article très ancien du Code Civil, l’article 1788, dispose que si, dans le cas où l’ouvrier fournit la matière, la chose vient à périr, de quelque manière que ce soit, avant d’être livrée, la perte en est pour l’ouvrier.
Cet article datant de la promulgation du Code Civil en 1804 est toujours d’actualité, et implique que la protection des ouvrages en cours de chantier relève de la responsabilité de chaque entreprise.
Ainsi, pendant les travaux, l’entreprise a la garde du chantier ce qui signifie qu’elle est responsable des ouvrages et en assume les risques jusqu’à la réception, qui marque le transfert de la garde au maître d’ouvrage.
La jurisprudence considère qu’est gardien du chantier la société qui en a l’usage, la direction et le contrôle (3ème Civ, 23 octobre 1991, n° 89-18511).
Pour les marchés privés, la norme AFNOR NF P 03-001 prévoit dans son article 13 que jusqu’à la réception des travaux, l’entrepreneur doit protéger ses ouvrages contre les risques de vol et de détournement, ainsi que contre les risques de détérioration. Il est également stipulé que pendant l’exécution de ses propres travaux, l’entreprise doit prendre les précautions nécessaires pour ne pas causer de dégradations aux ouvrages des autres constructeurs.
Ainsi, si un ouvrage est endommagé, l’entrepreneur doit le réparer, voire le reconstruire, à ses propres frais, sauf à se retourner ensuite contre les auteurs du dommage.
Prenons le cas d’une entreprise ayant réalisé l’étanchéité de terrasses dans le cadre de la construction d’un immeuble. Les autres intervenants, comme les préposés de maçonnerie, circulent, stockent des matériaux et montent des échafaudages sur ledit ouvrage, sans qu’aucune mesure de précaution ou de protection ne soit prise.
Ceci provoque des dégradations de l’étanchéité, causant des infiltrations d’eau. L’entreprise d’étanchéité doit alors reprendre ses travaux, et indemniser le maître d’ouvrage des dommages consécutifs. Elle diligente toutefois une expertise amiable, qui permet d’identifier les entreprises ayant causé les dégradations.
Aucun accord n’est trouvé malgré cette expertise, si bien que l’entreprise d’étanchéité n’a pas d’autre choix que d’assigner les responsables devant le Tribunal, sur le fondement de la responsabilité délictuelle de l’article 1240 du Code Civil, nécessitant de prouver la faute des autres intervenants.
La Cour d’Appel saisie du litige en question, se fondant sur le rapport d’expertise privé, a estimé qu’en plus de la responsabilité du maçon, il pouvait être retenu celle du maître d’œuvre et de l’OPC qui avaient manqué à leur obligation de surveillance du chantier et de contrôle de l’exécution des travaux.
De surcroît, l’entreprise d’étanchéité a engagé sa responsabilité à hauteur de 50 % dans la mesure où elle a contribué par sa négligence à la réalisation du dommage, en ne prenant pas les mesures adéquates pour protéger ses ouvrages (CA Lyon 4 octobre 2016, n° 14/03343).
En conclusion, il faut garder à l’esprit que si le responsable n’est pas identifié, et qu’aucune disposition contractuelle n’impute au compte prorata les frais de réfection en cas d’auteur inconnu, l’entreprise ayant réalisé l’ouvrage détérioré devra conserver à sa charge les travaux réparatoires.
Il peut toutefois arriver que la responsabilité du maître d’ouvrage soit également retenue, si une faute est caractérisée à son encontre, auquel cas l’article 1788 que nous avons évoqué au début de cette vidéo ne sera pas applicable (3ème Civ, 20 mai 2008, 07-14.585).
Voyons maintenant ce qu’il en est côté assurance : les risques dont on vient de parler sont-ils assurables ?
Comme nous venons de le voir, si l’ouvrage vient à être endommagé, l’entrepreneur est tenu de le reconstruire à ses propres frais, donc il est de son intérêt d’être assuré pour un tel risque.
Toutefois les risques liés à la protection des ouvrages en cours de chantier ne relèvent pas de l’obligation légale d’assurance. La garantie décennale ou biennale ne fonctionnera pas.
En revanche, une garantie spécifique peut être souscrite, notamment par le biais d’une police tous risques chantier, qui apporte une garantie à tous les intervenants.
Certains contrats d’assurance prévoient également des extensions propres à ce type de risque, qui doit être expressément mentionné.
Attention toutefois, car en général, les assurances en cours de travaux peuvent être limitées aux risques graves : on pense à l’effondrement total ou partiel de l’ouvrage, ou à l’incendie. Les dommages accidentels ne sont pas nécessairement couverts, d’où l’importance de bien lire sa police d’assurance, et de souscrire une garantie plus étendue.
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