Date de la réception tacite et chèque de règlement.
Date de la réception tacite : est-ce l’émission ou l’encaissement du chèque de règlement des travaux qui compte ? (Civ. 3ème, 1er avril 2021, n° 19-25.563).
Une société a confié des travaux d’étanchéité de toiture à une entreprise, assurée au titre de la garantie décennale.
Suite à des infiltrations causées par les travaux, le locataire a assigné le bailleur, après expertise, aux fins de procéder aux travaux de reprise. Le maître d’ouvrage a alors appelé en garantie le constructeur et son assureur.
La Cour d’Appel a débouté le maître d’ouvrage de sa demande formulée sur le fondement de l’article 1792 du Code Civil, et a rejeté ses demandes à l’égard de l’assureur décennal.
Les Juges d’appel ont suivi l’argumentation de l’assureur selon laquelle le paiement, et donc la date de la réception tacite, étaient intervenus postérieurement à l’apparition des désordres, si bien que la responsabilité décennale ne pouvait pas être engagée. Elle avait ainsi retenu la date d’encaissement du chèque comme date de réception tacite.
La Cour de Cassation a rejeté le pourvoi formé par le maître d’ouvrage à l’encontre de cet arrêt.
Elle a rappelé que selon l’article 1792-6 du Code Civil, la prise de possession de l’ouvrage et le paiement des travaux font présumer la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage de le recevoir avec ou sans réserves.
En l’espèce, le maître d’ouvrage se prévalait de la date d’émission du chèque, tandis que l’assureur souhaitait retenir la date d’encaissement du chèque plusieurs mois après. Tout l’enjeu du dossier était que les désordres étaient apparus entre les deux dates.
La Cour de Cassation a souligné que la date de paiement est celle de l’émission du chèque, correspondant à la date à laquelle le tireur s’en est irrévocablement séparé. Il appartenait donc au maître d’ouvrage de prouver la date d’émission du chèque, déterminant la réception tacite.
En l’occurrence, le maître d’ouvrage n’a pas été en mesure de prouver ladite date, aucun courrier de transmission du chèque n’étant versé aux débats.
La Haute Juridiction a donc approuvé les Juges d’appel qui avaient déduit de cette impossibilité de prouver la date d’émission du chèque, la nécessité de retenir la date de son encaissement comme date de la réception tacite.
Il peut être tiré de cet arrêt, publié au Bulletin, deux enseignements :
- la date à retenir pour la réception tacite est celle d’émission du chèque
- à défaut de pouvoir prouver cette date d’émission, les Juges retiennent la date d’encaissement
Cela peut avoir un enjeu déterminant si les deux dates sont éloignées dans le temps, et que dans l’intervalle, des désordres surviennent. Il est donc indispensable d’adresser le règlement par chèque par lettre recommandée avec avis de réception, à défaut de réaliser un virement bancaire.
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