Dossier technique incomplet fourni à l’assureur dommages-ouvrage : quelles conséquences ?
Bonjour à tous ! Je vous retrouve aujourd’hui pour la première partie d’une vidéo dont vous aurez la suite la semaine prochaine.
La question n’a pratiquement jamais été traitée en jurisprudence et pourtant elle donne lieu à des difficultés presque quotidiennes entre assureur et assuré en matière de police Dommages Ouvrage.
On sait que le processus de souscription d’une police Dommages Ouvrage suppose de fournir à l’assureur une documentation à caractère technique pour lui permettre d’éclairer sa décision de souscrire ou ne pas souscrire.
Beaucoup d’idées fausses circulent régulièrement sur les conséquences d’un dossier technique qui se révèlerait incomplet.
1) Première affirmation : Un assureur est en droit de refuser de souscrire s’il ne dispose pas de la documentation technique nécessaire
C’est VRAI :
Si on laisse de côté la possibilité toujours ouverte à un assuré assujetti à l’obligation de souscrire une police DO de saisir le Bureau Central de Tarification qui pourra seul contraindre l’assureur à souscrire, en vérifiant que la saisine émane bien d’un assujetti, un assureur peut refuser de souscrire pour des raisons de complétude du dossier technique.
2) Deuxième affirmation : Une fois l’attestation DO émise dans l’attente de la signature de la police elle-même, et le cas échéant, remise au notaire dans le cadre d’une VEFA, l’assureur serait néanmoins en droit de considérer dans certains cas qu’il n’est pas engagé.
Cela peut être vrai et faux à la fois.
Premièrement, c’est VRAI : Si l’offre transmise à l’assuré Maitre d’ouvrage, comportait de véritables clauses de conditions suspensives de mise en place des garanties. En effet, une attestation d’assurance ne saurait se substituer au contrat lui-même dans les rapports entre assureur et assuré, contrairement à une « note de couverture », mais qui n’a alors qu’une valeur temporaire.
Il faut toutefois apporter une nuance dans la mesure où dans ce cas, l’assureur en question engagerait sa RC professionnelle vis-à-vis du tiers acquéreur auquel l’attestation aurait été remise, pour avoir attesté de l’existence de garanties qui n’avaient pas pris effet au jour de l’émission.
Cela a déjà été jugé à propos de la délivrance d’une attestation RC décennale concernant un constructeur, alors que l’assureur venait préalablement d’adresser à l’assuré une mise en demeure pour non-paiement de prime avec suspension des garanties dans les 30 jours. Cass Civ 3ème 24 Octobre 2012 N° de pourvoi: 11-16.012
Deuxièmement c’est FAUX : Si aux termes de l’offre transmise à l’assuré et acceptée par lui, les garanties ont pris effet, en l’absence de conditions suspensives, et ce, même si l’offre indique que la police à émettre, comportera des conditions de garantie quant à la constitution du dossier technique.
En effet, aux termes de l’Article A 243-1 du Code des assurances, toute clause de la police qui aurait pour effet de limiter la portée des garanties serait réputée non-écrite et sans portée.
Or dans la mesure où la police DO comporte aussi une garantie obligatoire « avant réception », l’assureur ne saurait valablement invoquer des clauses qui conditionneraient l’application de la police à la remise à la fin du chantier de l’ensemble des attestations d’assurance RC décennale des constructeurs ou encore d’un rapport final du contrôleur technique exempt de réserves ou encore de l’absence de réserves non levées au PV de réception.
On pourrait même considérer qu’il s’agit d’avantage d’exclusions que de conditions de garantie ayant pour effet de neutraliser la garantie obligatoire avant réception.
Troisièmement c’est FAUX également : Si l’assureur invoque la déchéance de garantie prévue par l’Art L 121-12 du Code des assurances en raison d’une subrogation dans les droits de l’assuré devenue impossible par son fait.
Pour qu’il en soit ainsi, encore lui faudrait-il établir qu’à défaut d’avoir un recours contre un assureur RC décennale, à défaut de justifier des attestations d’assurance de certains constructeurs, ou encore de la levée de l’ensemble des réserves au PV de réception, il ne dispose plus d’aucun recours contre quiconque et notamment contre les constructeurs « ès qualité » sur leur patrimoine propre.
Enfin c’est FAUX: Si l’assureur invoque une « suspension de la garantie » prévue dans une clause de la police. Cette clause aurait également vocation à être réputée non écrite car cela reviendrait à altérer les stipulations de la clause type sur une durée ferme de 10 ans de la garantie après la réception.
Voilà, je vous retrouve la semaine prochaine pour faire le point sur deux autres affirmations !
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