Pompe à chaleur sur existant : vers une meilleure protection du maître d’ouvrage.
Pompe à chaleur : la Cour de Cassation étend la protection des maîtres d’ouvrage en appliquant la garantie décennale à des travaux sur existants (3ème Civ 15 juin 2017, n° 16-19640).
Un particulier avait confié la fourniture et la pose d’une pompe à chaleur air-eau à une société. Suite à des dysfonctionnements (absence de chauffage et d’eau chaude), une expertise judiciaire a été diligentée, et le maître d’ouvrage a assigné le constructeur et son assureur en indemnisation. La Cour d’Appel a rejeté ses demandes en retenant que les éléments d’équipement bénéficiant de la garantie décennale étaient ceux qui avaient été installés au moment de la réalisation de l’ouvrage, ce qui n’était pas le cas en l’espèce.
Au visa de l’article 1792 du Code Civil, la Haute Juridiction casse l’arrêt d’appel et estime que les désordres affectant des éléments d’équipement, dissociables ou non, d’origine ou installés sur existant, relèvent de la responsabilité décennale lorsqu’ils rendent l’ouvrage dans son ensemble impropre à sa destination.
La première question à se poser pour déterminer l’application de la garantie décennale est celle de savoir si les travaux en question constituent un ouvrage. De manière générale, il s’agit d’un ouvrage de nature immobilière, rattaché au sol ou au sous-sol, ou à un autre ouvrage. Il est composé d’éléments constitutifs d’une part, et d’éléments d’équipements d’autre part.
En présence d’un tel ouvrage, la responsabilité décennale s’applique :
- lorsqu’un élément constitutif ou un élément d’équipement indissociable est atteint dans sa solidité (articles 1792 et 1792-2)
- lorsqu’un élément constitutif ou un élément d’équipement (dissociable ou indissociable) rend l’ouvrage dans son entier impropre à sa destination (article 1792)
Les éléments d’équipement dissociables ne rentrant pas dans le deuxième cas de figure sont soumis à la garantie biennale de bon fonctionnement de l’article 1792-3 du Code Civil.
La question est plus délicate s’agissant des travaux sur existants comme dans l’arrêt commenté. Pour déterminer s’ils peuvent recevoir le qualificatif d’ouvrage, la Cour de Cassation utilise deux critères principaux :
- l’ampleur technique des travaux : si les travaux neufs sont suffisamment importants et constituent une rénovation lourde, ils sont assimilables à des travaux de construction d’un ouvrage.
- l’immobilisation : lorsque les travaux neufs sont intégrés dans l’ouvrage existant.
Dès lors, face à des travaux neufs consistant simplement en l’adjonction d’un élément d’équipement dissociable, telle une pompe à chaleur, la jurisprudence ne retenait pas systématiquement la qualification d’ouvrage, et pouvait exclure l’application de la garantie décennale et même de la garantie biennale. Seule la responsabilité contractuelle (non soumise à assurance obligatoire) pouvait donc éventuellement jouer, à charge pour le maître d’ouvrage de rapporter la preuve d’une faute du constructeur.
Le maître d’ouvrage se situait donc dans une situation différente selon que la pompe à chaleur avait été installée en même temps que la construction de son immeuble, ou postérieurement, et les décisions jurisprudentielles étaient variables.
L’arrêt du 15 juin 2017 vient clarifier la situation : le seul critère pris en compte par la Cour de Cassation en cas de pompe à chaleur est celui d’impropriété à destination de l’ouvrage dans son ensemble (en l’espèce, le maître d’ouvrage avait dû déménager en raison de l’absence de chauffage). Peu importe que l’élément d’équipement soit dissociable ou indissociable, d’origine ou installé sur existant.