Dol du constructeur : une violation délibérée et consciente de ses obligations contractuelles.
Dol du constructeur : l’action se transmet aux acquéreurs successifs de l’immeuble.
La notion de faute dolosive recouvre le fait que le constructeur est, nonobstant l’expiration du délai de garantie décennale, contractuellement tenu à l’égard du maître de l’ouvrage de sa faute dolosive lorsque, de façon délibérée, même sans intention de nuire, il viole, par dissimulation ou par fraude, ses obligations contractuelles.
Ces actions pour dol du constructeur se prescrivent selon les conditions du droit commun de la responsabilité contractuelle (cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer), et échappent ainsi au délai de dix ans à compter de la réception imposé à toutes les actions dirigées contre les constructeurs et leurs sous-traitants, instauré par l’article 1792-4-3 du Code Civil (3ème Civ, 25 mars 2014, n° 13-11184).
Le dol est toutefois rarement admis par la jurisprudence. Récemment, la Cour de Cassation a jugé que ne constituait pas une faute dolosive le défaut de surveillance des travaux du sous-traitant par le constructeur (3ème Civ, 5 janvier 2017, n° 15-22772, publié au Bulletin).
Par un arrêt du 12 juillet 2018, la Haute Juridiction donne une illustration de ce qu’elle entend par dol en droit de la construction (3ème Civ, 12 juillet 2018, n° 17-10627).
Des maîtres d’ouvrage ont fait construire une maison par un constructeur de maison individuelle. Puis la maison, dans les dix ans de la livraison, a été vendue successivement à deux reprises.
Les derniers acquéreurs, constatant des désordres relatifs au réseau électrique et à la charpente, ont assigné le constructeur et les deux vendeurs successifs.
La Cour d’Appel a accueilli le recours du sous-acquéreur à l’encontre du constructeur sur le fondement de la faute dolosive.
Le CMI, dans le cadre de son pourvoi, a soutenu qu’une telle action ne tenait pas à la qualité de l’immeuble mais supposait un dol commis à l’égard du maître de l’ouvrage, qui ne pouvait pas se transmettre au sous-acquéreur dont l’action ne pouvait être que de nature délictuelle.
Le pourvoi est rejeté par la Cour de Cassation qui valide le raisonnement de la Cour d’Appel, en soulignant que l’action pour faute dolosive s’analysait en une action contractuelle qui, attachée à l’immeuble, était transmissible aux acquéreurs successifs.
Puis la Troisième Chambre Civile explicite ce qu’elle accepte comme dol.
Ainsi, elle relève que le CMI avait présidé à la livraison et à la remise des clefs et que l’examen des lieux lors de la réception ne pouvait manquer de révéler la modification de la structure réalisée sur la charpente par le sciage des contreventements des fermettes et les insuffisances du plancher, qui n’était pas destiné à supporter des combles habitables.
La Cour souligne que le constructeur ne pouvait ignorer le projet d’aménagement des combles puisque les maîtres de l’ouvrage avaient déposé une demande de permis modificatif à cette fin.
En restant taisant lors de la remise des clefs malgré la connaissance de ces éléments, le constructeur a commis une violation délibérée et consciente de ses obligations contractuelles.