Dommages causés par les cocontractants du constructeur
Bonjour à tous !
Je suis ravie de vous retrouver pour une nouvelle vidéo.
Je vous propose aujourd’hui d’aborder la question des dommages causés par les cocontractants du constructeur : quelle responsabilité en découle pour ce dernier ?
Pour cela, nous allons évoquer plusieurs hypothèses.
Il existe une opinion répandue en matière de travaux de construction, qui est que quoiqu’il arrive, l’entreprise principale est responsable du fait de ses sous-traitants, avec lesquels le Maitre de l’ouvrage n’a aucun lien…
C’est parfaitement exact s’agissant de tous les désordres qui viendraient à affecter les ouvrages objets du marché.
Mais c’est faux s’agissant des dommages que les sous-traitants viendraient à causer aux tiers, en ce compris les riverains et le voisinage en général.
Depuis des arrêts de principe rendus par la Cour de Cassation en 1989 sur le sujet, il est considéré que dans la mesure où le contrat passé entre l’entreprise principale et son sous-traitant n’est pas un contrat de travail, mais un louage d’ouvrage, il n’en découle aucun lien de subordination qui ferait du traitant le « commettant » du sous-traitant.
L’entrepreneur principal n’est donc pas délictuellement responsable envers les tiers des dommages causés par son sous-traitant.
Civ 3ème 8 mars 1989 N° 87-12.189
Cette jurisprudence a sans cesse été renouvelée depuis.
En d’autres termes, l’entreprise principale n’est pas l’employeur du sous-traitant, si bien qu’elle n’a pas à être tenue de ses faits dommageables à l’égard des tiers comme le patron le serait de ses ouvriers…
C’est la raison pour laquelle il incombe au Maitre de l’ouvrage soucieux de sa protection de stipuler expressément dans le marché de travaux la responsabilité de l’entreprise traitante vis-à-vis de lui-même en raison des dommages causés aux tiers et résultant de l’exécution des travaux objets du marché.
Dans ces deux hypothèses donc, la conclusion est différente :
– Dans la première hypothèse, en cas de dommages à l’ouvrage, le traitant direct engage sa responsabilité en cas de dommages causés par son sous-traitant
– Dans la seconde hypothèse, en cas de dommages aux tiers, le traitant direct n’engage pas sa responsabilité en cas de dommages causés par son sous-traitant, sauf clause contractuelle contraire
Mais ces deux cas de figure ne concernent que les sous-traitants : qu’en est-il des autres cocontractants du traitant direct ?
Un arrêt du 13 avril 2023 est venu répondre à cette question.
Civ 3ème 13 avril 2023 n° 21-24.985
Les faits étaient les suivants. Dans le cadre de la construction d’un immeuble d’habitation, une société avait confié le lot gros œuvre à une entreprise.
Cette dernière avait loué une grue de chantier, et au cours de la manœuvre d’évacuation de la grue, celle-ci avait percuté le mur d’un bâtiment.
Le maître de l’ouvrage avait estimé insuffisante l’indemnité versée par son assureur, si bien qu’il avait assigné le constructeur en indemnisation.
Il a été débouté de ses demandes, et a formé un pourvoi en cassation. Son pourvoi a également été rejeté.
La Cour de Cassation a relevé que le contrat conclu par le traitant direct était un contrat de location portant sur la mise à disposition d’une grue, incluant les prestations de transport, montage et démontage.
Or le bâtiment avait endommagé justement au cours de la manœuvre d’évacuation de la grue, si bien qu’il pouvait en être déduit que le constructeur n’avait pas commis de faute dans l’exécution des travaux qui lui avaient été confiés par le maître d’ouvrage.
La Cour de Cassation a souligné qu’en l’absence de relation de sous-traitance avec le grutier, le traitant direct avec le maître d’ouvrage n’avait pas à répondre d’un dommage imputable à celui-ci.
Il faut donc que le cocontractant soit un sous-traitant pour que la responsabilité du traitant direct soit engagée vis-à-vis du maître d’ouvrage.
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