Dommages-ouvrage et réserves du contrôleur technique
Bonjour à tous, dans cette vidéo nous allons aborder quelques idées fausses qui circulent sur l’assurance dommages-ouvrage en cas de réserves du contrôleur technique.
Deux cas sont à distinguer :
Le premier cas concerne la non-levée d’une réserve du contrôleur technique découverte par l’assureur à la fin du chantier mais en dehors de tout sinistre.
1ère affirmation : Dans la mesure où la police elle-même qualifie cette situation « d’aggravation de risque », une surprime serait due, car aux termes de l’Article L 113-4 du Code des assurances, « l’aggravation de risque » justifie le paiement d’une surprime par l’assuré.
C’est FAUX… La possibilité offerte à l’assureur aux termes de cet article, de « proposer un nouveau montant de prime » voire de « dénoncer le contrat » suppose certes qu’on soit en présence d’une « aggravation de risque ».
MAIS ce même article L 113-4 qui est d’ordre public, prend soin de préciser ce qu’il entend par « aggravation du risque », il ne s’agit pas d’une notion abandonnée à la liberté contractuelle des parties.
L’aggravation de risque, pour être qualifiée de telle, doit procéder de « circonstances nouvelles » qui si elles « avaient été déclarées lors de la conclusion ou du renouvellement du contrat, l’assureur n’aurait pas contracté ou ne l’aurait fait que moyennant une prime plus élevée ».
La question se pose donc de savoir ce qui aurait pu être déclaré par l’assuré lors de la conclusion du contrat. Dans notre exemple, il aurait fallu que l’assuré ait été mis en situation de déclarer lors de la conclusion du contrat que les réserves du contrôleur technique ne seront pas levées et pour ce faire, encore eût-il fallu que la question lui ait été posée par l’assureur.
En effet, de jurisprudence constante, les déclarations de risque pour être qualifiées comme telles, doivent consister en des réponses à des questions posées par l’assureur préalablement à la souscription et dont il peut apporter la preuve (Cass Mixte 7 février 2014 N°12-85.107).
Aucune question n’ayant été posée sur ce point, l’assuré n’était donc pas en situation de déclarer quoi que ce soit au sujet des réserves non-levées du contrôleur technique ET DONC cette « circonstance nouvelle » n’aurait de toute façon jamais pu être déclarée par l’assuré…
2ème affirmation : Une surprime est due en vertu de l’Article L 113-9 du Code des assurances, car la police signée par l’assuré comporte une déclaration de sa part aux termes de laquelle « les réserves du contrôleur technique seront levées ».
C’est FAUX… Certes toutes les réserves du Contrôleur technique n’ayant pas été levées, nous pourrions penser qu’il s’agit donc « d’une déclaration inexacte de la part de l’assuré dont la mauvaise foi n’est pas établie » et par conséquent toujours aux termes de l’article L 113-9, « Si elle est constatée avant tout sinistre, l’assureur a le droit de maintenir le contrat, moyennant une augmentation de prime acceptée par l’assuré ».
Encore faudrait-il là aussi être en présence d’une véritable « déclaration de risque » effectuée par l’assuré pour que son inexactitude puisse donner lieu à sanction.
Or il ne peut s’agir en droit d’une déclaration de risque car :
D’une part, pour qu’une déclaration de l’assuré dans la police accède au rang de « déclaration de risque » au sens légal du terme, et être prise en compte au titre de l’Article L 113-9, de jurisprudence constante, la déclaration doit consister en des réponses à des questions posées par l’assureur préalablement à la souscription et dont il peut apporter la preuve, comme on vient de le voir.
Or ce genre de question ne peut et n’est jamais posée car elle reviendrait à exiger de l’assuré une vision prospective sur la qualité d’exécution des travaux par les entreprises.
D’autre part, les déclarations de l’assuré, qui ne constituent pas des réponses, peuvent être prises en compte à condition pour l’assureur d’établir leur caractère spontané et donc à l’évidence le fait qu’elles aient été préalables à l’établissement du contrat, lors de la présentation du risque à l’assureur et non simplement stipulées dans la police.
Le deuxième cas concerne la non-levée d’une réserve au PV de réception découverte par l’assureur lors d’un sinistre post réception.
1ère affirmation : les réserves figurant dans des rapports intermédiaires, voire dans le rapport définitif du contrôleur technique s’il est transmis avant la réception, vont s’ajouter automatiquement à la liste des réserves listées dans le PV de réception et de ce fait les entreprises seront tenues de les lever dans le cadre de la GPA.
C’est FAUX… c’est même tout le contraire : seules sont prises en compte au titre des réserves, les réserves figurant dans le PV de réception.
A l’inverse, si un désordre est dénoncé dans les rapports du contrôleur technique et non repris dans une réserve au PV de réception, on pourrait même considérer dans certains cas qu’il s’agit d’un désordre apparent à la réception non réservé et donc accepté par le Maitre de l’ouvrage. Sauf à démontrer par ce dernier que les réserves du contrôleur technique ne rendraient pas les désordres apparents dans leurs causes et leurs conséquences.
2ème affirmation : Si la réserve notifiée par le contrôleur technique au Maitre d’ouvrage est bien reprise en réserve dans le PV de réception et concerne un désordre grave, elle ne pourra être prise en charge par l’assureur dommages-ouvrage car il s’agit d’un désordre survenu avant réception et que dès lors, pour être couvert, il aurait dû donner lieu à la résiliation du marché concerné par la réserve.
C’est FAUX… Dès lors que le sinistre affecte la solidité de l’ouvrage ou compromet sa destination, la Cour de Cassation considère que s’agissant d’un sinistre déclaré en première année, ce sont les conditions prévues pour cette période qui doivent être respectées, à savoir : la mise en demeure de réparer adressée à l’entreprise titulaire du lot concerné par la réserve et demeurée infructueuse (Civ. 3e, 01 décembre 2009 N° 08-14.620).
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