Fabricant et délai de prescription de l’action contractuelle directe du maître d’ouvrage
Fabricant : le délai de prescription de l’action contractuelle directe du maître d’ouvrage, fondée sur le manquement au devoir d’information et de conseil, court à compter de la livraison des matériaux à l’entrepreneur (Civ 3ème, 3 octobre 2024, n° 22-22.792). (voir la vidéo ici).
Dans cette affaire, une SCI a entrepris la construction d’un groupe d’immeubles, à destination de logements, commerces et bureaux, à vendre en l’état futur d’achèvement.
Les constructeurs étaient notamment chargés de la fourniture et pose de lames brise-soleil et de garde-corps, ces derniers ayant été fabriqués et fournis par une autre société.
Postérieurement à la réception intervenue en 2004 et 2005, le syndicat des copropriétaires des résidences a allégué l’existence d’un phénomène de dégradation de ces éléments, et a donc assigné en référé expertise le promoteur, les constructeurs et l’assureur dommages-ouvrage, en 2013.
En 2014, l’assureur DO a assigné au fond les locateurs d’ouvrage, et l’un d’eux a appelé en cause le fabricant.
L’expert judiciaire a finalement déposé son rapport le 17 novembre 2015, et par conclusions du 11 août 2016, le SDC est intervenu volontairement à l’instance en sollicitant réparation de ses préjudices.
Le syndicat des copropriétaires avait notamment formulé ses demandes à l’encontre du fabricant en visant un manquement à son devoir de conseil. La Cour d’Appel a déclaré ses demandes irrecevables pour prescription, si bien que le SDC a formé un pourvoi.
Il estimait que le point de départ de son délai d’action était régi par l’article 2224 du Code Civil, à savoir le jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. Le syndicat des copropriétaires considérait de surcroît que ce n’était que le rapport d’expertise judiciaire, déposé en novembre 2015, qui avait permis de conclure à un défaut de fabrication des panneaux litigieux.
La Cour de Cassation a rejeté ce moyen du pourvoi, en rappelant que le délai de prescription de l’action contractuelle directe du maître d’ouvrage, fondée sur le manquement au devoir d’information et de conseil, court à compter de la livraison des matériaux à l’entrepreneur (jurisprudence depuis 3ème Civ, 7 janvier 2016, n° 14-17.033, publié au Bulletin).
La Haute Juridiction a souligné que le délai de prescription de dix ans, tel qu’il résulte de l’article L. 110-4 du Code de commerce, avait été réduit par la loi du 17 juin 2008 pour être porté à cinq ans. Or les dispositions transitoires de ladite loi prévoyaient que :
Les dispositions de la présente loi qui réduisent la durée de la prescription s’appliquent aux prescriptions à compte du jour de l’entrée en vigueur de la présente loi (19 juin 2008), sans que la durée totale puisse excéder la durée prévue par la loi antérieure.
La Cour de Cassation en a déduit que l’action du syndicat des copropriétaires sur le fondement du manquement au devoir de conseil était expirée le 19 juin 2013 (19 juin 2008 + 5 ans), alors que l’assignation avait été délivrée à l’encontre du fabricant le 25 novembre 2013.
L’action était donc prescrite.
Si le délai de prescription n’avait pas été réduit et était demeuré à 10 ans, l’action n’aurait pas été prescrite puisque les matériaux litigieux avaient été livrés à l’entrepreneur les 30 janvier 2004, 20 avril et 3 juin 2005, si bien que le SDC aurait été considéré comme ayant assigné dans les temps.
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