Garantie de livraison : la résiliation du contrat de construction ne caractérise pas la défaillance dans l’achèvement des travaux.
Garantie de livraison : la faute du maître de l’ouvrage peut empêcher la mise en jeu du contrat de garantie selon la Cour de Cassation (3ème Civ, 24 mai 2018, n° 17-11427).
Un couple avait conclu un contrat de construction de maison individuelle avec une société, tombée par la suite en liquidation judiciaire. L’entreprise avait, pour le compte des maîtres de l’ouvrage, souscrit une assurance dommages-ouvrage et avait obtenu de la CGI BAT une garantie de livraison à prix et délais convenus.
Se plaignant de malfaçons, le couple a, après expertise, assigné le constructeur en résiliation du contrat à ses torts exclusifs et en indemnisation, et a appelé en intervention forcée l’assureur et la CGI BAT.
La Cour d’Appel a rejeté leurs demandes formulées à l’encontre du garant de livraison, et la résiliation du marché a été prononcée aux torts partagés.
Les maîtres de l’ouvrage ont alors formé un pourvoi devant la Cour de Cassation en faisant valoir que la résiliation du contrat de construction n’entraînait pas celle du contrat de garantie de livraison.
La Haute Juridiction a rejeté ce moyen de cassation. Elle a relevé que le couple avait commis une faute en ne procédant pas aux paiements prévus au contrat, si bien que ce manquement était à l’origine de la rupture du lien contractuel. En effet, l’entreprise était fondée, en l’absence de paiement, à interrompre le chantier. Dès lors, le constructeur ne pouvait être considéré comme défaillant dans l’achèvement des travaux et dans l’exécution de ses obligations contractuelles au sens de l’article L. 231-6 du Code de la construction et de l’habitation qui régit la garantie de livraison.
La Cour de Cassation a ainsi estimé que le défaut d’achèvement des travaux n’était que la conséquence de la résiliation du contrat, de sorte que les demandes dirigées contre la CGI BAT devaient être rejetées.
Dans un important arrêt publié au Bulletin en 2010, la Haute Cour avait souligné que la garantie de livraison à prix et délais convenus, qui a pour but de protéger le maître de l’ouvrage contre les risques d’inexécution ou de mauvaise exécution de la construction provoqués par la défaillance du constructeur, constituait une garantie légale d’ordre public et autonome, qui ne s’éteignait pas du seul fait de la résiliation du contrat de construction, qui n’avait pas d’effet rétroactif (3ème Civ, 22 septembre 2010, n° 09-15318).
L’arrêt commenté ne prend pas une position inverse. Dans le cas d’espèce, la Cour de Cassation ne prononce pas la résiliation du contrat de garantie de livraison, mais énonce que les garanties ne peuvent pas être mobilisées faute de caractérisation de la défaillance du constructeur dans l’achèvement des travaux, ce dernier ayant été rendu impossible par l’absence de paiement des maîtres de l’ouvrage.