Mémoire définitif : la réponse du maître d’ouvrage est essentielle.
Mémoire définitif : à défaut de répondre au mémoire définitif de l’entreprise portant notamment des réclamations indemnitaires, le maître d’ouvrage est réputé l’avoir accepté (3ème Civ, 3 décembre 2020, n° 19-25392).
Une SCI avait conclu deux marchés à forfait avec la société SPIE. Conformément aux contrats, l’entreprise a notifié son mémoire définitif au maître de l’ouvrage en respectant la norme Afnor NFP 03-001.
En l’absence de réponse de la SCI, la société SPIE l’a assigné en paiement du solde des travaux et des dépenses supplémentaires.
Devant la Cour d’Appel, le maître de l’ouvrage a été condamné à régler au constructeur une somme globale d’environ 600.000 euros au titre des indemnités afférentes aux marchés et comprises dans le mémoire définitif.
Les Juges ont en effet estimé que la SCI n’ayant pas notifié ses décomptes définitifs dans les délais prévus par la norme, elle était réputée avoir accepté le mémoire définitif de l’entrepreneur.
La SCI a formé un pourvoi en cassation. Elle a considéré que les dispositions de la norme Afnor étaient contraires à celles de l’article 1793 du Code Civil, de sorte qu’elles étaient inapplicables dans le cadre d’un marché de travaux à forfait.
L’article 1793 du Code Civil dispose que lorsqu’un architecte ou un entrepreneur s’est chargé de la construction à forfait d’un bâtiment, il ne peut demander aucune augmentation de prix, si ces changements ou augmentations n’ont pas été autorisés par écrit, et le prix convenu avec le propriétaire.
La Cour de Cassation a rejeté le pourvoi du maître de l’ouvrage.
Tout d’abord, la Haute Juridiction a confirmé la position des Juges d’appel selon laquelle les demandes afférentes aux travaux modificatifs non autorisés ni régularisés devaient être écartées dès lors que les dispositions de l’article 1793 du Code Civil prévalent sur la norme NFP 03-001.
La Cour de Cassation a relevé ensuite que le mémoire définitif de l’entreprise mentionnait bien de manière précise et circonstanciée les manquements contractuels du maître d’ouvrage invoqués par l’entreprise (décalage des délais, coordination défaillante, désorganisation dans la gestion du chantier…) de même que les incidences financières supportées par le constructeur en lien avec ces manquements.
Dès lors, ces précisions permettaient à la SCI de respecter la procédure contractuelle de paiement, et de contester le principe et le montant des sommes réclamées.
Dans la mesure où le maître de l’ouvrage s’était abstenu d’apporter une réponse contradictoire aux demandes de l’entreprise, elle était réputée avoir accepté son mémoire définitif.
Les maîtres d’ouvrage doivent donc être particulièrement vigilants lors de la signature des marchés de travaux, et ce d’autant plus si le contrat ne fait que renvoyer à la norme, sans l’intégrer et la détailler. Le non-respect de la procédure est ainsi sévèrement sanctionné, mais correspond au principe selon lequel les conventions tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites (ancien article 1134 du Code Civil, désormais repris à l’article 1103).