Réception judiciaire et réception tacite

Réception judiciaire et réception tacite
Le 8 octobre 2024

Réception judiciaire et réception tacite : quelles différences ?

Bonjour à tous !

Dans cette vidéo, je vous propose de passer en revue quelques différences entre la réception judiciaire et la réception tacite.

Pour commencer, il n’y en a qu’une des deux qui est prévue par la loi : c’est la réception judiciaire, puisque l’article 1792-6 du Code Civil nous dit que : « La réception est l’acte par lequel le maître de l’ouvrage déclare accepter l’ouvrage avec ou sans réserve. Elle intervient à la demande de la partie la plus diligente, soit à l’amiable, soit à défaut judiciairement. ».

La réception tacite est quant à elle une création de la jurisprudence, qui a décidé qu’en l’absence de réception expresse, caractérisée par l’établissement d’un procès-verbal de réception, cette dernière peut être prononcée tacitement, dès lors que certains indices sont réunis.

Ces indices permettent alors au juge de considérer qu’il existe une volonté non équivoque du maître d’ouvrage de réceptionner.

Selon la jurisprudence, la prise de possession de l’ouvrage et le paiement de la quasi-totalité du prix des travaux permettent en général de caractériser une telle volonté du maître d’ouvrage, comme l’a encore rappelé la Cour de Cassation dans un arrêt du 6 juin 2024.

3ème Civ, 6 juin 2024, n° 22-23.557

 

Ces deux critères sont cumulatifs puisque la seule prise de possession n’établit pas la volonté tacite du maître de l’ouvrage de réceptionner les travaux.

3ème Civ, 05 janvier 2022 n° 20-22.835

 

Par exemple, des maîtres d’ouvrage qui ont constamment émis des contestations à l’égard des travaux réalisés ne peuvent pas se prévaloir d’une réception tacite, la conséquence étant l’absence d’engagement de la responsabilité civile décennale de l’entreprise.

3ème Civ, 24 mars 2016 n° 15-14.830

 

De même, le fait qu’un maître d’ouvrage n’a pas soldé la facture du constructeur et a refusé de signer l’attestation de bonne fin des travaux, s’oppose à ce que la réception tacite soit retenue.

3ème Civ, 16 septembre 2021 n° 20-12.372

Si ces critères sont réunis, alors le juge va « constater » la réception tacite.

 

Dans le cas de la réception judiciaire, cette dernière va être « prononcée » par le juge en présence de deux critères :

–       Le caractère effectivement habitable de l’ouvrage

–       Le refus injustifié d’une des parties de procéder à la réception

3ème Civ, 30 octobre 1991 n° 90-12.659

 

Dans le cas de la réception tacite, il n’y a pas nécessairement de refus de réceptionner, mais simplement l’absence de réception expresse.

Pour la jurisprudence, la condition principale à remplir pour prononcer la réception judiciaire est que l’ouvrage doit être en état d’être habitable.

3ème Civ, 26 janvier 2010, n° 08-70.220

 

Si la réception judiciaire peut intervenir malgré la présence de quelques malfaçons, et donc avec réserves, en revanche un immeuble qui ne peut pas être mis en service ne peut pas être réceptionné judiciairement.

3ème Civ, 30 octobre 1991, n° 90-12659

3ème Civ, 11 janvier 2012, n° 10-26.898

 

La jurisprudence relative à la réception judiciaire est bien établie, et consacre l’obligation des juges de rechercher si l’ouvrage est en état d’être reçu, c’est-à-dire habitable. Il s’agit alors d’apprécier ce caractère habitable au cas par cas.

3ème Civ, 2 février 2017, n° 16-11.677

3e Civ, 8 décembre 2021, n° 20-21.349

 

Et c’est là que réside une des grandes différences avec la réception tacite puisqu’elle n’est pas soumise à la constatation par le juge de l’habitabilité de l’immeuble.

Cela a été récemment rappelé par la Cour de Cassation dans un arrêt du 6 juin 2024 dans lequel un litige sur la réception était né dans le cadre de travaux de transformation d’un hôtel en appartements.

Les juges d’appel avaient rejeté les demandes du maître d’ouvrage fondées sur la réception tacite, en énonçant que l’ouvrage devait être suffisamment avancé pour être utilisable conformément à l’objet pour lequel il avait été réalisé, et que tel n’était pas le cas en l’espèce.

L’arrêt est cassé par la Haute Juridiction qui souligne que la réception tacite par le maître de l’ouvrage d’un immeuble d’habitation n’est pas soumise à la constatation par le juge que cet immeuble est habitable.

3ème Civ, 6 juin 2024, n° 22-24.047

Au contraire de la réception judiciaire, l’achèvement de l’ouvrage n’est ainsi pas une condition de la réception tacite (ou expresse d’ailleurs), tant que la volonté non équivoque du maître de l’ouvrage est exprimée.

3e Civ., 11 février 1998, n° 96-13.142

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