Rénovation : elle doit être lourde pour bénéficier de la garantie décennale.
Rénovation lourde : les désordres l’affectant peuvent mettre en jeu la responsabilité décennale du constructeur (3ème Civ, 21 juin 2018, n° 17-19762).
Pour déterminer si la garantie décennale a vocation à être mobilisée, il convient avant tout de savoir si les travaux en question constituent un ouvrage (pour un rappel de cette question, voir cet article).
Concernant les travaux sur existants, pour déterminer s’ils peuvent recevoir le qualificatif d’ouvrage, la Cour de Cassation utilise deux critères principaux :
- l’ampleur technique des travaux : si les travaux neufs sont suffisamment importants et constituent une rénovation lourde, ils sont assimilables à des travaux de construction d’un ouvrage.
- l’immobilisation : lorsque les travaux neufs sont intégrés dans l’ouvrage existant.
En l’espèce, une société avait confié des travaux de rénovation d’un immeuble à un artisan, avant de vendre les lots. Se plaignant de désordres, le syndicat des copropriétaires a assigné le maître d’ouvrage et le constructeur (depuis en liquidation judiciaire) en responsabilité et indemnisation.
La Cour d’Appel ayant retenu la responsabilité décennale du vendeur, ce dernier a formé un pourvoi devant la Cour de Cassation.
La Haute Juridiction a validé le raisonnement des juges d’appel. Elle a souligné que l’opération portait sur la restructuration d’envergure de l’immeuble, soumise à l’obtention d’un permis de construire. Il était en effet question de la transformation d’un hôtel en sept logements.
De surcroît, le devis de l’artisan prévoyait un nettoyage de la façade et une réfection complète des maçonneries défectueuses avec des reprises ponctuelles des ferraillages.
C’est ainsi que les travaux devaient être qualifiés de rénovation lourde. Dans la mesure où la solidité des balcons et des façades de l’immeuble était compromise et que la sécurité des personnes étaient menacée, la Cour d’Appel a pu en déduire que les travaux étaient affectés de désordres de nature décennale, et ainsi retenir la responsabilité du vendeur sur le fondement de l’article 1792 du Code Civil.
Cet arrêt est une nouvelle illustration de la mobilisation de la garantie décennale pour des travaux sur existants, par l’application du critère de l’ampleur technique des travaux, qui constituaient en l’espèce une rénovation lourde. La Cour de Cassation avait déjà eu l’occasion de juger s’agissant de l’aménagement de combles, que si les travaux consistaient en une transformation de l’ouvrage existant, alors ils étaient assimilables à la construction d’un ouvrage et étaient ainsi couverts par la garantie décennale (voir cet article).